Telegram, autrefois perçu comme un bastion de la confidentialité, a discrètement supprimé de sa page FAQ une affirmation clé indiquant que les discussions privées étaient exemptes de modération.
Douze jours après son arrestation en France, Pavel Durov, PDG de Telegram, a publié un communiqué sur son compte Telegram pour revenir sur les événements. Accusé par les autorités françaises d’avoir permis diverses activités criminelles sur sa plateforme, notamment la diffusion de contenus illicites, Durov a pris la parole dans un texte de 600 mots.
Il y exprime son étonnement et son incompréhension quant aux accusations portées contre lui, tout en reconnaissant que la gestion de Telegram est devenue plus complexe avec la croissance rapide de l’application.
Pavel Durov a été interrogé pendant quatre jours par la police française, qui le tient responsable de certaines activités criminelles se déroulant sur Telegram. L’arrestation est survenue à la suite de l’incapacité des autorités françaises à obtenir une réponse rapide de la part de Telegram concernant des enquêtes liées à des activités criminelles sur la plateforme, dont la distribution de matériel pédopornographique par un utilisateur non identifié.
Si un communiqué publié lors de son arrestation affirmait que Durov n’avait « rien à cacher », la situation a tout de même soulevé de nombreuses questions sur la modération des contenus illicites sur les réseaux sociaux.
Une défense fondée sur la transparence et la coopération
Dans son communiqué, Durov affirme que la situation était inattendue, car Telegram dispose d’un représentant officiel dans l’Union européenne chargé de répondre aux demandes des autorités. Il déclare que l’adresse de contact dédiée aux forces de l’ordre est facilement accessible en ligne, soulignant que les autorités françaises auraient pu entrer en contact avec lui via des canaux diplomatiques.
Durov explique également que Telegram a toujours été ouvert à la collaboration avec les régulateurs. Il se dit attaché à trouver un équilibre entre la vie privée et les exigences en matière de sécurité, tout en rappelant que la plateforme a déjà refusé de coopérer dans des pays aux régimes autoritaires. Il cite notamment le cas de la Russie, qui avait demandé à Telegram de fournir les clés de chiffrement pour surveiller les utilisateurs, ce que l’entreprise avait refusé, entraînant son interdiction dans le pays.
Les défis de modération à l’ère de la croissance
Si Durov défend la mission de Telegram et les principes de confidentialité sur lesquels l’entreprise est fondée, il admet néanmoins que la croissance rapide de la plateforme a engendré des « douleurs de croissance ». Le nombre d’utilisateurs a récemment atteint les 950 millions, rendant la modération plus difficile et ouvrant la voie à des abus de la part de certains criminels.
Durov reconnaît que l’entreprise doit s’améliorer en matière de transparence et de modération. Il assure que Telegram a déjà commencé à prendre des mesures internes pour mieux contrôler les abus et renforcer les protocoles de sécurité. Il fait également mention des rapports de transparence que Telegram publie régulièrement et des collaborations avec des ONG pour traiter les demandes urgentes liées à la modération des contenus.
Un avenir plus sûr pour Telegram ?
Malgré les critiques, Pavel Durov demeure optimiste quant à l’avenir de Telegram. Il espère que les récents événements permettront à l’entreprise de se renforcer, ainsi qu’à l’industrie des réseaux sociaux dans son ensemble, en matière de sécurité et de gestion des contenus.
Les premières mesures semblent déjà être mises en œuvre. Sur la page FAQ de Telegram, une section intitulée « Il y a du contenu illégal sur Telegram. Comment puis-je le faire retirer ? » a été modifiée au cours des dernières 24 heures. Auparavant, Telegram répondait que toutes les discussions privées étaient confidentielles et que l’entreprise ne traitait pas les demandes de retrait de contenu. Ce changement de cap marque une étape significative dans la manière dont Telegram envisage de gérer la modération, avec des répercussions possibles sur la perception de la confidentialité sur la plateforme.
Ce récent incident met en lumière les défis complexes auxquels sont confrontées les grandes plateformes de communication, notamment celles qui opèrent à une échelle mondiale. Telegram, souvent critiqué pour son approche permissive vis-à-vis de la modération, semble désormais s’engager sur la voie d’une régulation plus stricte, tout en maintenant ses principes fondateurs de protection de la vie privée.